Résister au chômage, en effectuant des démarches auprès d’institutions pouvant redéfinir la situation, présente un coût spécifique : celui de ne pas obtenir gain de cause, de ne pas passer avec succès l’épreuve de valorisation. Cela peut provoquer des attitudes ambivalentes, des hésitations et tergiversations, des reports des démarches. C’est le cas pour cet homme (32 ans, séparé, ouvrier du bâtiment, 21 mois de chômage) qui a négocié un départ de son entreprise parce que l’exercice de son métier (plâtrier) provoquait des problèmes persistants de santé. Ces derniers disparaissent après un traitement, mais la reprise de son activité professionnelle (sous une forme non déclarée) fait resurgir les mêmes problèmes. Les horizons se bouchent alors, d’autant que l’éventualité d’une reconversion est exclue car il rejette fermement toute perspective de formation. Le chômage est devenu une « galère totale », aggravée par une rupture familiale. Les projections les plus sombres affleurent dans le discours (« se retrouver dans la rue »), et la seule alternative éventuelle consisterait à faire reconnaitre sa maladie pour qu’elle devienne une qualité valorisable. Mais cette perspective est formulée dans des termes montrant qu’elle est peu appropriée (« on m’a dit que l’asthme, bon, niveau d’avoir un petit chose. Tout ça c’est des paperasses, des trucs de bureaucrates »), et il n’a engagé aucune démarche (n°C15).