L’écart avec les objectifs professionnels peut résulter d’un autre argumentaire, qui ne porte pas sur les difficultés de maîtrise de ces activités mais sur leur caractère clandestin, illégal. Cette illégalité, caractéristique de tout travail rémunéré de manière informelle, est peu évoquée par les enquêtés. Mais elle l’est explicitement par cet homme (26 ans, célibataire chez sa mère, employé de commerce, plus de trois ans de chômage) qui n’a eu que des très brèves périodes d’emploi et qui célèbre son « sens des affaires ». S’il est peu disert sur la nature des activités dans lesquelles il est engagé, en revanche il souligne qu’il connait « beaucoup de monde », qu’il a des « bons plans », qu’il connait « le business ». La récurrence de ces expressions est pour une part un marqueur de stratégies discursives d’auto-valorisation, mais elle renvoie aussi à des activités concrètes, apparentées à du commerce illicite. Cela apparait clairement dans un balancement du récit entre une forte valorisation de capacités à s’en « sortir tout seul » et des restrictions liées aux difficultés à tenir dans le temps (« c’est dangereux », « faut être prudent », « pour le moment ça le fait »). Il reste une incertitude sur la nature des marchandises échangées, mais il est clair que ce mode de vie, déviant, est vécu comme transitoire ou du moins n’est pas envisagé comme définitif sinon durable (n°C45).
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Témoignage
L’accès au marché de l’emploi
Un processus de marchandisation